Cherbourg
Lundi, le bassin du commerce a débordé
Plus de Cent dix de coefficient de
marée
La mer s'est invitée sur les routes
des autos,
Les passants, étonnés, caressent les
bateaux.
Je revois à Cherbourg ma petite grand
mère
Et son bout de jardin au bord de sa
rivière
Où, à l'heure de manger elle portait
sa bassine
Remplie de linge et de tabliers de
cuisine.
Devant le pont tournant, sortaient de
l'Arsenal
métalliers et soudeurs, emportant leur
journal
Où était notée l'heure de la grande
marée
Où le Queen Mary pourrait toucher le
quai.
Le dimanche, quelquefois, plage
Napoléon
Comme lui je pointais vers la perfide
Albion.
La rade s'étendait et frisait sous la
houle
Quand le vent descendait de la Montagne
du Roule.
Arrivé à l'octroi, au sortir de la
ville
Je cherchais du regard la rue de
Tourlaville
où résidait mon oncle, penché dans
son jardin
depuis l'aube et les premières lueurs
du matin
Au bassin du commerce, aujourd'hui sous
les eaux
Nos pas sont effacés, disparus bien
trop tôt,
Effacé le baiser donné face à la mer
Sur ton front ridé de petite grand
mère.
Lundi le bassin du commerce a débordé
Plus de cent dix de coefficient de
marée.
photo Lemesle Emmanuelle